Récit

Les jeunes se jettent à l’eau

2021

Jusqu’ici, il n’y avait pas moyen, à Bruxelles, de piquer une tête dans une piscine à ciel ouvert ou dans un étang. Maintenant, c’est possible : une vingtaine de jeunes apprentis-bâtisseurs issus des quartiers populaires de Cureghem, à Anderlecht, se sont attellés à la construction d’une base nautique arrimée au bord des étangs de Neerpede. Un projet qui a pu voir le jour grâce au soutien du Fonds Albert Desmed, géré par la Fondation Roi Baudouin.

Baptisé ‘Build For Water’, ce projet innovant est porté par le Centre de Référence pour la Construction à Bruxelles (CDR Construction), une asbl de sensibilisation et de formation aux métiers de la construction durable. Pour certains aspects techniques, l’association collabore avec FIX, une entreprise d’économie sociale qui réalise des travaux de rénovation dans les écoles et les bâtiments publics de Bruxelles. L’objectif est triple : mobiliser les jeunes et les initier aux métiers de la construction, les sensibiliser à l’économie circulaire et aux problématiques de la gestion de l’eau, et leur faire découvrir les sports nautiques.

Philippe Van Ginderdeuren, coordinateur de CDR Construction, commente : "Ce projet colle parfaitement aux ambitions du Fonds Albert Desmed : il permet à petite vingtaine de jeunes – filles et garçons membres pour la plupart de l’asbl SAFA, une association de quartier de Cureghem – de comprendre comment l’économie circulaire peut préserver les ressources en eau, et comment construire de manière innovante, sans impact négatif sur l’environnement. En bout de course, il convient aussi de les intéresser de près à l’initiative, en les faisant profiter de leur réalisation : dans quelques jours, ils pourront se baigner dans l’étang !".

Rien ne se perd

Cet étang, c’est celui du Mayfair, l’un des rares de la capitale à s’enorgueillir d’une eau de qualité propice à la baignade et aux activités aquatiques à Bruxelles. "Ce n’est pas un véritable étang", précise tout de même Philippe Van Ginderdeuren, en montrant le mince filet d’eau qui s’y déverse. C’est la Neerpedebeek, une modeste rivière, qui crée un circuit d’eau. Le cycle en est minutieusement respecté par les concepteurs de la base nautique, dont la surface de près de 50 m² abrite les vestiaires, les douches, les toilettes, l’infirmerie et le local technique. L’eau des douches rejetée dans l’étang sera de qualité supérieure après sa filtration, et ses résidus seront réutilisés comme engrais. Les toilettes seront sèches, l’urine et les excréments transformés en fertilisants. La plupart des matériaux utilisés, comme les panneaux blancs qui recouvrent le bois de la base nautique, ont été récupérés dans le cadre du démantèlement des tours du World Trade Center, près de la gare du Nord à Bruxelles.

Le projet est entièrement autonome en eau. Des étudiants en Master bio ingénieur de l’ULB en ont réalisé le volet technique. Ils effectueront en outre un monitoring de la qualité de l’eau et de l’impact de l’utilisation de la base nautique sur la faune et la flore ambiantes. Au printemps 2021, des panneaux solaires permettront de couvrir les modestes dépenses en électricité.

Des jeunes fiers et assidus

Sous le masque, on ressent toute la fierté du responsable de CDR Construction : la concrétisation d’un projet novateur, réalisé dans les délais fixés et dans le respect scrupuleux de l’environnement. C’est aussi le fruit d’un partenariat entre des acteurs locaux : des associations de quartier, une entreprise d’économie sociale et la Commune d’Anderlecht – le CDR Construction jouant le rôle de coordination. Et tout cela au cœur d’une zone naturelle protégée qui attire de nombreux jeunes sportifs, les jeunes pousses du Sporting d’Anderlecht, les joggeurs, les amateurs d’autres activités physiques proposées aux abords des étangs.

Il est midi, c’est l’heure de la pause : Aymen (14 ans) quitte le chantier avec un de ses potes. Il ne cache pas sa joie : "J’ai décidé de participer au projet parce que j’ai toujours adoré bricoler. Mais ici, c’est du sérieux. J’ai appris des tas de choses, depuis les mesures de sécurité sur un chantier, jusqu’au maniement des outils, de la perceuse, de la foreuse et tous les autres. Il s’agit que les angles soient droits. Je me verrais bien dans un métier de la construction plus tard. Mais, en attendant, chaque fois que je viendrai aux étangs et que je serai devant la base, je me dirai : ‘‘J’y suis pour quelque chose.’’ Et j’en suis fier !".

Philippe Van Ginderdeuren se félicite : "Nous avons rarement vu des jeunes aussi motivés, attentifs et disciplinés. D’ailleurs, au début du stage, on a cru qu’ils n’avaient pas de smartphones ou de GSM. Bien sûr, chacun possède le sien, mais personne ne l’utilise. Cela ne les intéresse plus. Ils sont absorbés dans une activité d’adulte et cela les valorise".

Petit étang, grandes ambitions

La commune d’Anderlecht soutient le projet et a l’intention d’ouvrir le lieu à d’autres activités, comme le water-polo ou le paddle. Bien sûr, le petit étang du Mayfair ne concurrencera jamais celui de Hofstade ou les lacs de l’Eau d’Heure. À Neerpede, il s’agira d’ailleurs de réserver avant de plonger. En sachant que, pour des raisons de régénération de l’eau, on n’acceptera qu’un groupe de quinze personnes par heure.

“Ce projet a permis à des jeunes de comprendre comment l’économie circulaire peut préserver les ressources en eau, et comment construire de manière innovante.”
Philippe Van Ginderdeuren
Coordinateur de CDR Construction

Si les initiateurs du projet ont donné le goût à quelques jeunes Bruxellois.es de s’engager dans une filière des métiers de la construction (le CDR Construction forme 1.400 jeunes par an dans une spécialisation. FIX offre deux ans de formation aux demandeurs d’emploi non qualifiés), ils auront fait coup double. D’une part, ils auront réussi un projet d’économie circulaire, d’autre part ils auront contribué à la mise à l’emploi de jeunes peu scolarisés, dans un secteur de métiers en pénurie. En réalisant en plus une première: inaugurer le premier lieu de baignade à ciel ouvert dans la capitale européenne.

À propos du Fonds Albert Desmed

Géré par la Fondation Roi Baudouin, le Fonds Albert Desmed soutient des projets qui visent à développer une plus grande conscience des problèmes écologiques et à promouvoir des comportements plus respectueux de la conservation d’un environnement de qualité, particulièrement en ce qui concerne la problématique de l’eau. Depuis janvier 2020, le Fonds a soutenu deux projets, pour un montant total de 186.850 euros.

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