Récit

Une chaire universitaire pour aider les jeunes en souffrance

2023

C’est entre 16 et 24 ans que les troubles mentaux font le plus souvent leur apparition. Pourtant, à cet âge, l’accès aux soins psychiatriques est loin d’être optimal. La Chaire en « Psychiatrie de transition dans un monde en transition » est née de ce paradoxe.

La psychiatrie de transition est mal connue. Il s’agit d’un vaste champ de connaissances, encore peu exploré, dont le centre d’attention est constitué de jeunes adultes ou de grands adolescents, atteints de troubles de la santé mentale, et qui ne trouvent pas vraiment leur place dans le paysage de la psychiatrie. « La question de la transition entre la pédopsychiatrie et la psychiatrie pour adultes se pose pour des jeunes de 16 à 24 ans qui se retrouvent à cheval entre ces deux systèmes de soins », explique Simone Marchini, pédopsychiatre et doctorant à l’Université libre de Bruxelles.

Marchini est chercheur au sein de la Chaire en « Psychiatrie de transition dans un monde en transition », créée sous l’égide de Véronique Delvenne, cheffe de service en pédopsychiatrie à l’Hôpital Universitaire Des Enfants Reine Fabiola (HUDERF), en collaboration avec le CHU Brugman, l’Hôpital Erasme et le Service de Santé Mentale de l’ULB. Avec cette chaire, la psychiatrie de transition est érigée au rang de discipline à part entière. En Flandre, une chaire, consacrée au même domaine, intitulée « La santé mentale dans une période de défis », a aussi vu le jour, sous les auspices de la KULeuven. Les deux projets ont reçu un soutien de 1,2 millions d’euros, étalés sur 4 ans – de 2019 à 2023 – par l’intermédiaire de différents Fonds que gère la Fondation Roi Baudouin.

Entre 15 et 20 ans, un « pic » de troubles mentaux

L’action de la Chaire s’articule d’abord autour d’études. La première concerne l’émergence des psychopathologies, de la bipolarité à la schizophrénie, en passant par les troubles anxieux ou alimentaires. A quel moment ces pathologies se déclenchent ? Quels sont les signes qui peuvent les rendre visibles par l’entourage ? Marchini : « Le pic de l’émergence de troubles mentaux se situe entre 15 et 20 ans. Il s’agit donc d’une période-clef en termes d’évaluation et de prise en charge précoce. Mais l’autre constat, c’est que cette tranche d’âge recoupe en partie celle où l’accès aux soins de santé mentale est le moins évident. » Cet hiatus est « en partie dû à la conception de nos services », ajoute le psychiatre, en pointant à nouveau cette division entre services et cette barrière factice des 18 ans. « La société a changé. Les jeunes adultes forment leur famille plus tard qu’avant et, bien souvent, ils sont encore dépendants de leurs parents, du moins en partie. Les problématiques sont donc différentes de celles des adultes. »

Le second champ d’étude concerne l’offre de soins. Les dispositifs les mieux adaptés à ces jeunes sont passés au tamis des chercheurs. En créant une « Chaire » consacrée à la psychiatrie de transition, les équipes soignantes ne veulent pas se contenter d’étudier un phénomène. « Le but est que les équipes cliniques modulent les services qu’elles offrent aux jeunes en fonction des nouveaux modèles d’intervention précoce, en cohérence avec la littérature scientifique », reprend Simone Marchini.

« Le but est que les équipes cliniques modulent les services qu’elles offrent aux jeunes en fonction des nouveaux modèles d’intervention précoce. »
Simone Marchini
pédopsychiatre et doctorant

Les connaissances scientifiques accumulées par les chercheurs de la Chaire sont d’abord transmises aux professionnels du soin ou de l’aide sociale, via des colloques, des séminaires et un Certificat Universitaire dédié, puis mises en pratique, dans les services psychiatriques des hôpitaux, bien sûr, mais aussi dans les réseaux de santé mentale. BRU-STARS, le service de santé mentale pour enfants et adolescents de la région bruxelloise, a, par exemple, constitué une équipe consacrée aux jeunes de 16 à 23 ans. Enfin, les équipes mobilisées autour des travaux de la Chaire ambitionnent de toucher le plus grand nombre et de vulgariser les savoirs. Une chaîne YouTube a été lancée pour promouvoir des contenus sur la santé mentale et permettre des auto-évaluations de symptômes. Le but recherché : rendre les soins accessibles et insuffler les connaissances le plus largement possible.

Donner la parole aux jeunes et à leurs parents

La chaire de psychiatrie de transition "Youth in Transition : Mental Health in a Challenging Period" de la KU Leuven partage le point de vue de leurs collègues de l'autre côté de la frontière linguistique. Toutefois, les chercheurs de Louvain, dirigés par le psychiatre Ruud Van Winkel, adoptent une approche différente. Afin de mieux adapter les soins existants aux besoins des jeunes, ils ont mené une étude appelée "Empower". Ils ont examiné les expériences des jeunes, des parents et des travailleurs sociaux en ce qui concerne l'offre de soins existante et leur ont demandé comment ils pensaient que les soins pour ce groupe cible devraient être organisés. Sur la base de ces résultats, un groupe de travail a formulé des recommandations au gouvernement. Grâce à des enquêtes, des aspects partiels de ces résultats seront analysés afin de découvrir ce que les jeunes pensent réellement être important dans l'organisation des soins de santé mentale qui leur sont destinés. Tous les résultats seront officiellement présentés le 3 octobre lors de l'exposition "Youth in Transition" dans le bâtiment Dirk Bouts à Louvain. Au moyen de collages, d'installations et d'autres produits artistiques, les résultats seront annoncés à un public composé de jeunes, de parents et de travailleurs humanitaires, et les initiatives d'aide pourront présenter leurs activités.

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